Agen. Hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty
Un moment de recueillement public était organisé, mardi dernier, sur le parvis de l’hôtel de Ville à 19 heures, à l’appel de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, afin de rendre hommage à Dominique Bernard, professeur de lettres de la cité scolaire Gambetta-Carnot d’Arras, mortellement poignardé par Mohammed Mogouchkov, ancien élève d’origine Tchétchène de 20 ans qui avait prêté allégeance à l’état islamique, revendiquant, dans une courte vidéo, sa haine de la République française, de la démocratie et de l’enseignement prodigué.
L’histoire se répète. Encore. Comme un mauvais film, comme un jour sans fin où la violence gravit un à un les paliers de l’abjection. On espérait pourtant ne jamais revivre un 16 octobre 2020, jour funeste au cours duquel Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie au collège du Bois d’Aulne, à Conflans-Sainte-Honorine perdait la vie, décapité par Abdoullakh Anzorov, un autre citoyen russe de 18 ans, d’origine tchétchène parce que le professeur avait montré, à des élèves de quatrième, deux caricatures du prophète Mahomet, dans le cadre d’un cours d’enseignement moral et civique portant sur la liberté d’expression. Avec l’attentat de Charlie Hebdo, nous avions découvert qu’un crayon pouvait tuer. Nous avons découvert avec effroi il y a trois ans que le seul fait d’enseigner peut aussi tuer.
Un enseignant est un jardinier de l’âme, il sème les graines du savoir avec amour, dans l’espoir qu’elles fleurissent en sagesse. Jean D’Ormesson
« Nous sommes très très inquiets » confie Fatma, vice-présidente du conseil de quartier du parc Chabaud « le 6 à l’Unisson » dont la fille est professeure d’allemand, de français et de théâtre. Quelqu’un qui est harcelé, doit être surveillé de près ! » Fadela condamne aussi fermement ces actes : « Les gens comme ça, il faut qu’ils soient condamnés ! Il faudrait embaucher des agents de sécurité à l’entrée des écoles. Cela créerait des emplois et les enfants, comme les parents, se sentiraient en sécurité. Les portiques de sécurité, c’est une bonne idée. ». Dominique, enseignant à la retraite, se « demande comment il peut exister des gens qui dénient aux autres le droit de vivre. Le métier était, à mon époque, sûr… ». Sa compagne estime que « l’on ne peut pas faire comme aux États-Unis, armer les profs » !
Les enseignants, première ligne de la République
Sous les drapeaux en berne, le maire a demandé à respecter une minute de silence en hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty. Les enseignants sont devenus une cible pour ces criminels moyenâgeux et Jean Dionis, maire d’Agen, en présence de nombreux élus de son équipe et de l’opposition municipale a exprimé son soutien au corps enseignant : « Je veux dire notre détermination à être avec eux dans la durée. La République ne reculera devant rien. Quand elle le devra, elle se fera respecter. Je m’appelle et vous appelle à du courage. Ces actes horribles ne doivent pas nous faire perdre l’ambition d’avoir une laïcité apaisée, une laïcité déterminée, courageuse. Mohamed Fellah (adjoint au maire, délégué, entre autres fonctions, à la laïcité, Ndlr) va mettre en place une commission pour faire vivre cette laïcité. Que nous le voulions ou non, la France est impliquée dans ce qui se passe au Moyen-Orient. Il faut avoir le cœur de dire les choses, les horreurs qui se sont passées au sud d’Israël et qui a un nom : la barbarie terroriste à condamner partout. Nous avons été solidaires des Etats-Unis, de l’Espagne… Nous devons aujourd’hui être solidaires envers Israël et reconnaître à Israël le droit de combattre ceux qui ont commis ces crimes. J’ai été bouleversé par ce qu’a dit Monseigneur Jean-Paul Vesco, archevêque d’Alger (dans une tribune publiée le 16 octobre dernier dans le journal « La Croix », Ndlr) « La violence barbare du Hamas est sans excuse, mais elle n’est pas sans cause ». Je suis en faveur de deux états. Cette mise en œuvre de deux états se fera dans des torrents de larmes et de peine, mais c’est la seule voie possible pour une paix durable. Attendez-vous à un mois difficile. Est-ce qu’il faut pour cela être découragé ? Je ne le crois pas ». Une haine inimaginable a atteint des sommets entre la France et l’Angleterre durant plusieurs siècles, puis entre la France et l’Allemagne, mais nos pays sont aujourd’hui réconciliés et apaisés. « J’ai la conviction qu’un jour la paix règnera entre Israël et la Palestine, espère Jean Dionis. Il ne sert à rien de détourner le regard d’Israël, bien au contraire. Regardez-la. L’histoire nous invite à l’espoir ».