Crise Agricole. Courrier adressé à Gabriel Attal par la CR47 et la Chambre d’Agriculture
Un courrier, cosigné par Karine Duc et José Perez, coprésidents de la Coordination Rurale de Lot-et-Garonne ainsi que par Serge Bousquet-Cassagne, président de la Chambre d’agriculture, a été adressé à Gabriel Attal, Premier ministre, en date du 27 mai dernier. La Loi d’Orientation Agricole qui a été votée à l’Assemblée nationale le 26 mai, ne satisfait pas les attentes des agriculteurs. Elle est jugée pas assez ambitieuse, car elle n’apporte aucune solution au problème structurel de la profession et, notamment, aucune clé pour l’augmentation du revenu des agriculteurs.
Les acteurs lot-et-garonnais du monde agricole ont tenu à alerter Gabriel Attal sur la détérioration des situations économiques des fermes du territoire, depuis leur rencontre du 4 mai dernier à la Préfecture de Lot-et-Garonne.
« Lors de votre venue, de nouvelles dispositions bancaires avaient été annoncées pour aider les agriculteurs les plus en difficultés, or aujourd’hui nos banques nous indiquent ne pas avoir reçu de directives !
La loi EGALIM, que vous avancez sans cesse comme LA solution, n’en est pas une puisque la crise a empiré. Force est de constater qu’intermédiaires et distributeurs contournent sans cesse cette loi, et appliquent des marges abusives, toujours au détriment de l’agriculteur et du consommateur.
En ce qui concerne la PAC, ses retards de paiements, rajoutent des difficultés financières aux agriculteurs, ses contraintes environnementales, coûtent toujours plus cher aux agriculteurs et ses obligations de jachères font perdre des productions et des revenus aux agriculteurs.
Le cœur de la crise agricole, nous vous le rappelons, est le revenu des agriculteurs.
Or, non contents de ne pas pouvoir se verser un salaire décent, les agriculteurs ont de plus en plus de difficultés à faire face à leurs charges. En témoigne, le nombre important d’appels d’agriculteurs qui ne peuvent plus payer leurs factures et se retrouvent dans une impasse quand leurs partenaires financiers leur refusent des courts termes.
À cette situation déjà catastrophique s’ajoute l’angoisse d’un avenir encore plus sombre, compte tenu des aléas climatiques, nous avons d’ailleurs alerté le Préfet à ce sujet :
– les pluies de l’automne ont empêché les semis d’hiver, il n’y aura donc pas de revenu cet été lié aux récoltes des cultures d’hiver et les trésoreries vont s’effondrer ;
– les pluies du printemps compromettent fortement les semis, et donc les futurs revenus.
Il est d’ailleurs à prévoir, à ce sujet, des conséquences malheureuses pour les montants de la prochaine PAC, mais aussi pour la capacité des agriculteurs à s’assurer. Le système d’assurance des cultures n’est pas efficient et les résultats ne sont pas à la hauteur des ambitions de départ, notamment, car les moyennes et références qui servent au calcul des indemnisations sont plombées par plusieurs années d’aléas successifs.
Le constat est sans appel, les agriculteurs croulent sous les charges.
D’une part, ils subissent l’inflation sans pouvoir répercuter les hausses de coût de production sur le prix de vente, comme le fait n’importe quel autre entrepreneur, puisque ce n’est pas l’agriculteur qui fixe ses prix, mais l’acheteur et le marché.
D’autre part, le gouvernement a démontré son incapacité à agir sur l’augmentation des prix d’achat des productions agricoles.
Compte tenu de ce constat, nous vous avons donc demandé, la création d’un statut particulier de l’agriculteur afin de le protéger, en lui assurant des revenus dignes et, par là même, de protéger la souveraineté alimentaire de notre pays en pérennisant la profession agricole.
Ce statut particulier serait la possibilité pour ses membres de bénéficier de boucliers énergétiques, sociaux et fiscaux.
Les prix des énergies doivent être baissés, bloqués et ne pas suivre l’inflation française qui est trop importante par rapport aux prix auxquels les productions françaises sont achetées, Les coûts sociaux doivent être minorés, que ce soit pour le coût de la main d’œuvre ou pour les cotisations personnelles des agriculteurs.
Le volet fiscal doit lui aussi être revu à la baisse concernant par exemple les taxes foncières dont la baisse doit être plus importante que celle des 20 à 30% annoncée. Les droits de successions doivent, eux aussi, être diminués et la taxe sur les produits phytopharmaceutiques doit, quant à elle, être supprimée.
Si vous souhaitez sauvegarder l’agriculture française, et lui donner un avenir, vous devez vous assurer que celle-ci reste compétitive au niveau mondial, en baissant ses charges au niveau national, niveau sur lequel vous avez la main. Ces baisses de charges créeront automatiquement du revenu pour l’agriculteur. Et vous n’y parviendrez qu’au travers de mesures protectionnistes.
Arrêtez avec les annonces médiatiques, prenez des mesures très concrètes et fortes, c’est-à-dire des mesures qui changeront réellement le revenu des agriculteurs et leur quotidien !
Faut-il en venir à menacer le bon déroulement des jeux olympiques, à l’image des agents de la RATP ou de la SNCF, pour être entendus et pour que vous réagissiez ?
Les paysans sont, aujourd’hui, dans leur campagne de production et ont la tête dans le guidon.
Nous vous rappelons, ici, que lorsqu’ils relèveront la tête de leur dur labeur, à l’automne, les agriculteurs feront les comptes. S’ils constatent que leur situation économique ne s’est pas améliorée, et il ne pourra pas en être autrement si vous ne réagissez pas, vous recevrez alors leur colère.
Colère à la hauteur de ce que vous aurez semé : mesurettes et mépris !
N’ayons pas peur des mots, cet automne sera le temps d’une agriculture meilleure ou celui du chaos ! »