Grégori Baquet : « Il faut arrêter la sacralisation à outrance du théâtre » !

Festival Divers du Nouveau Théâtre du Jour

Le « Festival Divers » du Nouveau Théâtre du Jour, porté par la Compagnie Rive, se drape de sept spectacles du 26 au 30 décembre prochains, dont cinq en soirée dans ses murs, rue Paulin Régnier et deux en journée, place Wilson.

Depuis août dernier, la Compagnie Vive, cofondée par Grégori Baquet et Victoire Berger-Perrin en 2016, redonne vie au lieu mythique dirigé par Pierre Debauche durant trois décennies, suite à un appel à projet lancé par la ville d’Agen. Loin de se reposer sur ses lauriers, l’équipe s’est déjà lancée dans des travaux de peinture. L’eau et l’électricité sont désormais fonctionnelles dans la cuisine. Les loges et la menuiserie sont refaites. Le faux plafond va être remplacé et la scène réagencée pour accueillir plus de spectateurs… Du peps, des projets, des spectacles… le Nouveau Théâtre du Jour sort de sa chrysalide et déploie ses ailes de résilience et de créativité pour sortir de sa zone de confort, faire grandir le spectacle vivant en y apportant des touches de soi.

En amont de la représentation du « Dictionnaire amoureux de l’Inutile », programmée le 23 novembre dernier au théâtre Ducourneau, Grégori Baquet a animé une rencontre ouverte au public avec François Morel et son fils Valentin, abordant le thème de la filiation artistique.

Un festival d’hiver aux tonalités diversifiées

Du 26 au 30 décembre, le Nouveau Théâtre du Jour effectuera son baptême du feu par le biais de son premier « Festival Divers » : « Nous nous sommes aperçus que tout s’arrêtait un peu entre Noël et le Nouvel An » explique Grégori, désireux de prolonger les festivités avec plusieurs petits spectacles, à commencer, mardi 26 décembre à 20 h 30 par le « K » : Grégori relatera douze histoires fascinantes, drôles et effrayantes, extraites du recueil de nouvelles de Dino Buzatti. Deux spectacles seront proposés mercredi 27 décembre : « À la rescousse du Père Noël » de la compagnie PerBacco à 15 heures place Wilson, une mise en scène déambulatoire pour aider le Père Noël à retrouver ses lunettes (spectacle gratuit) pour conduire le traîneau qui le ramènera en Laponie et « Folles Noces » à 20 h 30 de la compagnie Deva, spectacle musical dans l’esprit de Roger Louret, mené par la pétillante Catherine Delourtet et Jean-Paul Delvor. Le public sera invité à répondre à « L’appel de la forêt » jeudi 28 décembre à 20 h 30, un seul en scène de la compagnie Road Movie Cabaret, d’après le roman de Jack London. Deux spectacles seront programmés vendredi 29 décembre : « Bête Beurk » à à 15 heures place Wilson, de la compagnie Monde à Part, conté par Frédéric David qui expliquera les angoisses des enfants en partant du principe que la terre est plate, visite de sa face sèche et humide… un délire pertinent sur la rencontre, la tolérance et le respect, sur fond de fable écologique puis à 20 h 30, Frédéric David accompagné à la guitare par Yann Lefer, sombrera dans les « Folies ordinaires », dénonçant les batailles de clochers, défendant l’idée des différences et prônant la nécessité de s’ouvrir au monde… Le spectacle musical « Colarature » clôturera vendredi 29 décembre à 20 h 30 ce festival. Grégori Baquet accompagnera Agnès Bove qui interprétera Florence Foster Jenkins, une riche héritière américaine dans les années 30, s’improvisant soprano colorature et infligeant aux plus fameux airs un traitement redoutable par sa fausseté et ses fantaisies rythmiques.

Elle deviendra pourtant incroyablement populaire au fil de récitals et d’enregistrements improbables, à tel point qu’Hergé, le « papa » du célèbre journaliste à houppette, lui rendra hommage à travers la Castafiore.

Deux créations durant le premier semestre 2024

Le Nouveau Théâtre du Jour proposera, entre le 14 et le 24 mars, la création de « La Raison du plus fou », une comédie de Franck Mercadal, mise en scène par Grégori Baquet. Jean-Jacques Rousseau vient de finaliser « Les Confessions », ouvrage où le philosophe règle ses comptes avec son ami de vingt ans, Denis Diderot qui vient lui rendre visite, un soir, afin qu’il cesse ses critiques. Rousseau refuse, estimant que la sincérité n’a pas de prix, alors Diderot propose alors de le défier aux échecs. Le gagnant décidera du sort de l’autre. « La raison du plus fou » éclaire, de manière humoristique, les pensées des deux philosophes. « L’idée est d’avoir une interaction avec le public, de casser le quatrième mur » souligne Grégori.

La troupe du Nouveau Théâtre du Jour adaptera « Tailleur pour dame », grand classique de Georges Feydeau, marrainé par Catherine Salviat, sociétaire honoraire à la Comédie-Française, qui viendra jouer dans ce spectacle, présenté du 5 au 15 juin. « Les comédiens de cette pièce seront les professeurs des 15-20 élèves de la classe qui ouvrira en septembre 2024, annonce Grégori Baquet. Une manière pour les parents et les futurs élèves de découvrir la future équipe pédagogique. Cette classe ne sera pas ouverte aux débutants, mais aux jeunes en devenir professionnel. L’idée est qu’en fin de première année, ils intègrent notre troupe et que les compagnies locales viennent faire leur marché ! Ils devront savoir chanter, jouer d’un instrument, avoir la velléité de parler anglais. L’idée serait de proposer des spectacles en anglais pour la population anglaise qui se déploie. »

Faire rayonner la culture sur le territoire

Le Nouveau Théâtre du Jour développe un partenariat avec le conservatoire d’Agen. Les petits du CRDA (chapeautés par Rachel Delaistier, professeur de chant choral) vont répéter en décembre leur spectacle de fin d’année dans ses murs. Il accueillera aussi six spectacles de la programmation hors les murs du théâtre Ducourneau. Des rencontres et des échanges seront également organisés avec les Montreurs d’Images. « Il faut faire en sorte que le quartier du Pin redevienne un quartier incontournable d’Agen » souligne Grégori. « Nous allons faire venir des auteurs, des comédiens de renommée nationale pour être plus attentifs vis-à-vis des jeunes de la région, annonce Vincent Fras. François Morel est prêt à faire une masterclass. L’idée, à terme, d’accueillir 25 à 30 comédiens en permanence au théâtre, reprendre les tournées locales… »

« Nous allons faire des erreurs, nous allons apprendre et nous serons à l’écoute de toutes les remarques, promet Grégori. C’est notre première fois à tous. Nous n’avons jamais dirigé de théâtre ». Le grand rêve de Grégori Baquet serait de rouvrir le théâtre de Poche de Monclar qui accueillait pas moins de 1 500 spectateurs dans un village d’environ 700 âmes à l’époque pour la Nuit du Théâtre des Baladins en Agenais. « J’aimerais faire un hommage à Roger Louret et réunifier le sport et la culture » annonce l’ancien Baladin.

Un bien essentiel à la culture, à l’audace, au renouveau

« L’art vivant devrait être sous l’égide du ministère de l’Education et de la Santé » estime Grégori Baquet. Vincent Fras estime nécessaire, pour ne pas dire vital, d’« ouvrir le théâtre au plus grand nombre. Il faut arrêter de cloisonner, créer des ponts avec le sport, recréer un lieu de vie, de société. Une scène sera installée dans le hall avec un piano. Ceux qui le voudront pourront proposer quelque chose comme lire un poème, proposer une chanson… Il faut que le lieu vive en permanence ! »

« 96 places, ce n’est pas rentable, estime Grégori Baquet. Nous allons augmenter la jauge (ce qui se traduira par un raccourcissement de la scène qui conservera malgré tout un fort potentiel).

Le bar ouvrira une heure et demie avant chaque représentation. Nous voulons aussi ouvrir une bibliothèque en bas dans le hall, pour lire des brochures et des livres ayant appartenu à Pierre Debauche et Roger Louret* et laisser ouvert les répétitions. Il faut arrêter la sacralisation à outrance du théâtre ! »

*Grégori Baquet rejoindra la troupe du metteur en scène Roger Louret en 1995 pour la comédie musicale « Les Années Twist » et sera membre de la troupe jusqu’en 1998. Il se produira également dans « les Z’années Zazous » puis dans « L’Arlésienne ».