Actualité

« Un Premier ministre de l’ombre »

Visite à Djébonoua des membres de l’association du Petit Colibri dont Bernard Lusset (au centre de la photo). © Le Petit Colibri

Décès de Bernard Lusset

Bernard Lusset s’est éteint, mais la flamme de son souvenir est sans cesse ravivée par les témoignages de ceux qui l’ont côtoyé dans la sphère intime et (ou) professionnelle, à l’instar de Pierre Souillé et Jean-Marie NKollo.

Pierre Souillé et Bernard Lusset avaient un parcours très gémellaire. Ils ont tous les deux effectué leur parcours estudiantin Bordelais à Sciences Po. « Nous sommes nés le même jour, même si quinze années nous séparaient, a confié Pierre Souillé. Je le considérais d’ailleurs comme mon grand frère. Bernard était quelqu’un de très pudique. Dans sa jeunesse, il avait vécu des drames, mais n’en parlait jamais. » Leur rencontre fut liée à Jean Dionis : « J’ai candidaté comme assistant parlementaire et c’est à cette occasion que j’ai rencontré Bernard. Nous avons eu un coup de foudre amical. Il était très proche des gens sans être pour autant docile : « La première des choses que tu dois apprendre, c’est celle d’être indépendant », me conseillait-il ». Pierre Souillé a exercé ses fonctions de 2018 à 2022 en qualité de directeur général des services adjoint de l’administration commune (ville d’Agen et agglomération d’Agen) puis s’est lancé un nouveau défi entrepreneurial. Il a donc quitté ses fonctions le 19 mai 2022. « Ce fut le premier à qui j’ai annoncé mon départ pour reprendre un cabinet d’assurance, comme lui ! Il m’a dit : « Pierre, fonce » !  Lors de la cérémonie d’adieu organisée en son honneur à la salle des Illustres de la ville d’Agen, Bernard Lusset, déjà installé au Sénégal, lui avait fait la surprise d’enregistrer un message pour rendre hommage à son grand ami : « C’était une vidéo extraordinaire. Il disait : « N’ayons pas peur de dire les choses. Les seuls départs tragiques sont ceux qui n’ont jamais eu lieu. » Il s’occupait toujours des autres et c’était très rare qu’il ait une discussion qui commençait par lui. Nous nous voyions très souvent le soir après sa sortie du cabinet d’assurance. » Lors de son départ brutal le 12 août dernier, Bernard Lusset avait retrouvé pour quatre mois son pied-à-terre situé en Albret, dans la commune « Le Saumont » : « Il était très heureux d’avoir enfin trouvé des amis là-bas, au Sénégal », se souvient Pierre Souillé avec émotion.

Bernard et Catherine Lusset, en compagnie de Roland Kouadio, nouveau maire de Djébonoua. © Le Petit Colibri

Un homme pondéré et nuancé

« Je ne voudrais pas que l’on résume Bernard à sa seule dimension politique, a tenu à souligner Pierre Souillé, mais c’était un Premier ministre de l’ombre qui prodiguait des conseils politiques : « Le plus important, c’est d’être à la hauteur », assurait-il. C’était un élu très attentif à la vie de ceux qui mettaient en œuvre. Il mettait toujours les mains dans le cambouis et déclarait : « Je dis, je fais ! » Il était à la fois le stratège et le mis en œuvre, mais il laissait toujours la lumière aux autres. Il avait une rapidité cérébrale et cognitive hors norme. Pour moi, il existe deux formes d’intelligence : une intelligence cognitive et une intelligence situationnelle. Il savait s’adapter, être là au bon moment et trouver les mots justes. Il aurait pu exercer des responsabilités nationales. J’ai adoré chez lui son étanchéité complète entre les sphères publiques et privées, sa capacité à faire adhérer les gens à ses idées, avec des arguments affûtés. Il était brillant, tout en étant accessible. Il ne parlait que lorsqu’on le lui demandait. Il ne parlait de lui que si vous insistiez. Notre souci, aujourd’hui, est un manque de nuance. Il m’a appris très vite que la nuance est une preuve d’intelligence. Il ne détenait pas la vérité. Il était très tranché sur ce qu’il voulait faire, mais il prenait le temps de la réflexion. Il proposait toujours des hypothèses. Lorsqu’il donnait des conseils, il disait toujours : « Tu as le choix entre ceci ou cela, tu auras ceci ou cela comme conséquence » C’était un homme de compromis et de sagesse. C’est un homme remarquable qui nous quitte et qui avait encore beaucoup à nous apporter… »

Visite de la délégation municipale agenaise. © Le Petit Colibri

Bernard Lusset, discret bénévole humanitaire

« Le Petit Colibri »* est une association agenaise d’entraide avec les habitants de Djébonoua et Bouaké (Côte d’Ivoire) créée en marge de la coopération décentralisée entre les deux communes (Agen et Djébonoua) afin d’élargir les échanges dont le président fondateur ne fut autre que Bernard Lusset. La nouvelle convention triennale (premiers accords signés en 2018) a été cosignée le 26 juin 2023, salle des Illustres par Fabienne Chollet (épouse de Jean-Baptiste Chollet), présidente du Colibri d’Agen et Roland Kouadio, président du Colibri de Djébonoua. Le problème de l’accès à l’eau est au cœur des préoccupations des deux communes : en effet, la distribution publique de l’eau s’effectue depuis Bouaké, capitale régionale, mais la densité croissante de sa population fragilise l’accès à l’eau des communes avoisinantes, d’où la nécessité de prolonger le déploiement des pompes hydrauliques villageoises. L’association s’est aussi illustrée dans la lutte contre la Covid 19 en 2020 avec l’envoi de deux containers en faveur des habitants de Djébonoua et de la région de Bouaké en Côte d’Ivoire comprenant des sacs de riz, des masques de protection, des sachets de savon, des tracteurs, des vélos, du matériel informatique, de livres, du matériel médical, des jeux, des jouets… « Le message de l’association est clair : « On ne peut pas tout faire, mais voici notre petite part », a confié Jean-Marie Nkollo, conseiller municipal délégué aux Jumelages et à la Coopération décentralisée. Une autre association a vu le jour, en parallèle de sa grande sœur : « Le Petit Colibri du Centre ». Nul doute que l’œuvre de Bernard Lusset n’en est qu’à ses balbutiements et que sa mémoire continuera d’être honorée avec élégance et discrétion, bonté et simplicité, ce qu’il incarnait à la perfection.  

* le blog est http://lepetitcolibri.org/ et non https://www.assolepetitcolibri.com/

Un cahier de condoléances est mis à la disposition de l’ensemble des Agenais, dans le hall de la mairie d’Agen, depuis mercredi 14 août (mairie ouverte en continu de 8 heures à 15 heures).

Les obsèques de Bernard Lusset seront célébrées vendredi 16 août à 10 heures en l’église Notre-Dame du Saumont.

Véronique David

Journaliste
Après un diplôme de psychologie et un DU de Japonais, j’ai préparé un diplôme de Naturopathie-homéopathie avec la faculté Libre de Médecine Naturelle et d’Ethnomédecine de Paris XV ainsi qu’une formation de correctrice avec le Centre d’Écriture et de Communication de Paris V qui m’a aussi formée aux techniques journalistiques. Dans le même temps, j’ai rédigé des articles pour différents journaux et administrations (Mairie d'Agen, Conseil départemental de Lot-et-Garonne, Actif Formation...). J’ai aussi travaillé au sein de divers organismes (Caf, Pôle Emploi, ODAC, MEDEF, ENAP…) dans le domaine du secrétariat et préparé une formation de praticienne en coaching de Vie. Dans un tout autre domaine, je suis officier de réserve citoyenne dans l’Armée de Terre depuis une dizaine d’années. J’ai appris au fil du temps que « toutes les batailles de la vie nous enseignent quelque chose, même celles que nous perdons » (Paulo Coelho). Rêvons en grand, soyons audacieux et bâtissons l’impossible !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *